On the road, Lystrella, Tristan, Bleys

(je reprends au petit matin, si vous avez des choses particulières pendant la nuit, décrivez-les dans votre section).

Tristan et Lystrella sont réveillés au petit matin par un tambourinement énergique, et insistant, sur les portes de leurs appartements. Ouvrir une porte, ensommeillé ou non, et se trouver nez à nez face à un Bleys remonté à bloc et tout sourire, n'est pas forcément bon signe. L'oncle est déjà prêt et a fait dans le sobre : tenue légère de type renaissance, avec juste un léger plastron et de hautes cuissardes, le tout à dominante bleu pâle. Le seul objet réellement encombrant et l'épée ceinte à son côté. Dans un élan d'indulgence, il accorde à ses neveux quelques minutes pour se préparer et avaler une collation à la hâte.

Une fois tout le monde prêt, Bleys sort un atout de sa fille.
"- Vous allez voir, j'ai le moyen de transport idéal !"

La plus noble estafette d'Ambre revêt à la hâte la tenue qu'elle avait sélectionné la veille, après maintes hésitations. Un costume de cavalier quelque peu démodé, somme toute : chausses turquoises très ajustées, tunique à manches longues de la même couleur, épais gilet noir brodé d'or. Plus étonnant, le casque, les genouillères et les épaulières, d'aspect chitineux. Après avoir enfilé de hautes bottes noires et s'être assuré de n'avoir rien oublié, et surtout pas son jeu d'atouts à la ceinture, Tristan suit son oncle et sa cousine.

L'enthousiasme de Bleys ne déteint pas sur le jeune prince. C'est avec calme qu'il répond :

- "Un carrosse serait apprécié, sinon approprié, mais je me contenterai de la monture que vous aurez choisie, mon oncle."

Avant d'arriver à Ambre, Tristan se flattait d'être un cavalier émérite, comme tout aristocrate digne de ce nom. Le premier destrier offert par son père, un étalon un peu trop fougueux issu des haras de Julian, l'incite cependant à la prudence.

Bleys éclate d'un rire sonore et flanque une claque dans le dos de son neveu.
- "J'apprécie ton humour mon prince. Vous verrez, j'ai mieux en tête. Plus agréable, plus rapide et aussi plus sûr au regard de la menace qui nous concerne..."
Le sorcier sort alors un atout de sa fille, échange quelques mots avec elle et demande ensuite à sa nièce et son neveu de lui mettre la main sur l'épaule.

La première sensation qui les assaille est la chaleur. Sèche, écrasante. Contrastant désagréablement avec le froid maintenu par les pierres du palais d'Ambre. Cette sensation n'est pas la seule à être intense. Les Ambriens se retrouvent devant une vaste tente rouge, elle-même moyée au sein d'un vaste caravansérail. D'après les sons et les odeurs, l'ambiance est à la fête. De tous les côtés, chansons et cris accompagnent les fumets des cuissons installées sur les feux éparpillés dans tout le camp. Tout autour, ce n'est que sable à perte de vue.

Clara fixe ses deux cousins. Quelque chose dans son regard et son attitude semblent différents, après les événements de cette nuit. Lucidité ? Déception ? Méfiance ? Toujours est-il que son maintien et l'attitude des autochtones vis à vis d'elles indiquent qu'elle est parfaitement à l'aise ici. Elle accompagne la troupe en périphérie, vers un grand enclos. Les craintes de Tristan se confirment, et probablement l'enthousiasme de Lystrella : des dragons de couleur bleutée, grands comme de beaux griffons, se dressent fièrement sur le sable. Trois d'entre eux sont harnachés, leurs rênes attachés à la clôture. Bleys se tourne vers ses neveux :
- "Ne sont-ils pas magnifiques ?"

Lystrella exulte. Elle a déjà chevauché de nombreuses montures exotique, comme les oliphans de Tassini ou bien les kamels du désert de Rambara, mais jamais de sa jeune existance une créature volante !

Dans d'enthousiasme elle assaye le Bleys de questions.

- "Quelles étranges bêtes est-ce la mon oncle ? Comment les nomme-t-on et surtout comment est-ce que celà se monte ?"

Tristan a salué Clara avec un grand sourire. La fille de Bleys ne semble plus se faire d'illusion sur sa famille, voilà un progrès à louer et à encourager. Il suit son oncle et des cousines, en admirant les chapiteaux colorés. La découverte de leur moyen de transport provoque des sentiments mitigés, mais il ne laisse même pas échapper un soupir.

Sans se départir de son calme habituel, le jeune prince commente à son tour les créatures, d'un ton presque enjoué.

- "Tout à fait pittoresques. Dignes des plus grandes fresques, même."

Avec un peu de chance, ces bêtes seraient plus confortables que les scolopendres géants du Comte Chilos, un ami de sa mère.

C'est Clara qui prend la parole pour répondre à sa cousine.
- "Elles n'ont pas de noms particuliers ; dans cette ombre on leur donne un nom dont l'équivalent serait simplement "dragon". Ces terres sont peuplées de nombreuses créatures draconiques, aux particularités et morphologies marquées. Elles ont mêmes presque totalement supplanté les mammifères. Cette variété est parmi les plus petites mais ce sont des montures endurantes et relativement rapides ; leur couleur bleuté rend les repérages au sol plus difficiles. La monte se fait plus ou moins comme un cheval : les étriers servent à la direction et les rênes pour gérer l'altitude. Plus vous tirez, plus elles montent et si vous vous ramassez complètement sur leurs dos, elles plongeront. Je vous ai mis des vivres dans les sacoches pour tenir quelques jours."

Bleys reprend la parole.
- "Les attaques dont ont été victimes vos cousins venaient du sol. La voie aérienne est indiquée.
Puis, quand vous enfourchez vos montures, qui se révèlent d'une grande docilité :
- Tristan, je suggère que tu nous ouvres la route, si tu n'y vois pas d'objection. Après tout, c'est ton expédition, conclu-t-il d'un sourire malicieux."

Lystrella avance sa main, paume vers le haut, en direction des naseaux de la bête. Puis, après avoir été reniflé, flatte l'encolure de l'animal. Si c'est un reptile à sans froid il faut qu'il connaisse son odeur.

D'un jeste précis elle attrape les rennes et bondit souplement sur le dos de sa monture.

- "Nous vous suivons cousin !"

La jeune aventurière évalue son dragon, puis affirme sa position.

- Et à défaut d'un rapide topo je ne suis pas contre un point sur l'étiquette aux Cours pendant le voyage. Vu que je suis persona non grata à Ambre j'aimerai éviter de m'illustrer de la sorte au Chaos." Non sans un petit clin d'oeil malicieux à son oncle.

Le fils du roi inspecte la créature et surtout son harnachement - un sabotage est si vite arrivé. Il prend le temps de régler les étriers, puis s'installe sur la selle sans excès de témérité. Il s'adresse à ses futurs compagnons de route, toujours aussi sérieux et appliqué.

- "Je réalise l'honneur que vous me faites en me laissant conduire cette délégation jusqu'à mon ombre natale. Néanmoins, je crains d'être trop concentré sur le chemin à parcourir pour pouvoir en même temps donner des leçons sur la courtoisie impériale. Je laisserai donc notre oncle exposer ce qu'il jugera bon. Je dirai juste que les nobles des Cours sont souvent plus à cheval sur l'étiquette que les courtisans d'Ambre. Hmm... Un cheval têtu comme un âne et funeste comme un dragon."

Tristan salue une dernière fois Clara.

- "Merci pour votre aide, chère cousine. Vous avez toujours mon atout, si vous voulez joindre un membre de cette expédition. J'espère vous revoir bientôt."

Tristan avait donné un de ses atouts à la fille de Bleys, voir les épisodes précédents.

Sans plus de cérémonie, le jeune prince tire doucement sur les rênes de sa monture, l'invitant à décoller. Il compte atteindre une altitude suffisante pour éviter une volée de flèches, mais lui permettant cependant de distinguer les détails du paysage.

Les montures ont été parfaitement préparées et se laissent approcher sans difficultés. Durant les premières secondes du contact, elle dardent leurs langues fourchues, probablement pour capter les odeurs. Quelques instants et réglages plus tard, tout le monde est installé et prêt au départ. Clara vous adresse un léger hochement de tête, à la fois approbatrice et probablement un peu envieuse, puis s'adresse à son cousin :
- "Très bien, je vous contacterai pour prendre de vos nouvelles."

En l'air, les montures réagissent très bien et s'avèrent faciles à manœuvrer. L'altitude à laquelle Tristan souhaite les mener doit leur être familière : les créatures au sol vous paraissent minuscules mais restent identifiables ; aucune d'entre elles ne lèvent les yeux en votre direction. Altitude de chasse.

Bleys répond à Lystrella de façon laconique :
- "La relation des habitants du Chaos vis à vis de nous est équivoque : un mélange de haine et d'admiration. Quant à l'étiquette, il faudrait des décennies pour en percevoir toutes les facettes. Suis les conseils de Tristan et tout devrait bien se passer".
Rapidement, il vous apparaît que le vol est peu propice à la conversation, les vents couvrant vos voix. Bleys a l'air de s'en accommoder plutôt bien.

Le jeune prince soupire. Il est temps de faire reposer les montures. Et son esprit, sans doute. Un dernier effort lui apparaît toutefois nécessaire.

Il se baisse, comme lui a indiqué Clara, pour faire lentement descendre son dragon. Tristan mobilise encore une fois son pouvoir. L'ombre actuelle lui paraît bien trop aride. Il cherche un monde proche, plus accueillant. Un torrent, courant le long du défilé. Une dizaine de caprins, venus s'abreuver. Aucune bête plus grosse qu'un chien sauvage dans les environs. Quelques traînées de nuages dans un ciel rosâtre, une heure avant le crépuscule.

Méfiant, s'attendant à voir surgir des tueurs derrière chaque rocher, Tristan entreprend un lent atterrissage. Il se tourne vers ses compagnons de route et parle assez fort pour se faire entendre.

- "Je propose de faire halte ici !"

- "Bonne idée, mon dragon commence à donner des signes de fatigue."

Après avoir mis pied à terre, Lystrella attache sa monture, avec quelque noeud marin, puis libère la bête de son harnachement afin d'entreprend tant bien que mal de la panser.

- "Je me propose d'aller trouver du gibier. Je suppose, mon oncle, que ces reptiles aime la viande saignante ?"

L'ombre respire la quiétude et le repos. La température est bien plus clémente qu'à votre départ et le clapotis de l'eau contraste avec les vents tourbillonnants d'altitude.
Bleys descend de sa monture et s'étire le dos en grimaçant :
"Ils sont omnivores mais tu as raison, ils ne dédaignent pas un peu de viande fraîche de temps en temps. Cependant, je doute qu'ils ne mangent beaucoup : des températures plus basses ont tendance à les rendre un peu léthargiques..."
Sur ces mots, l'oncle se met en quête de petit bois et d'un endroit pour installer son paquetage, goûtant à ces moments simples.

Du côté de la rivière, les petites chèvres s'éloignent du groupe. Il est vrai que les dragons pourraient les avaler presque en une seule bouchée. Par petits bonds, elles sautent sur les pierres de la rivière pour atteindre la rive opposée.

En quelques pas, Lystrella atteint le sommet de la colline qui surplombe le cours d'eau. Quelques bosquets sont disséminés dans un relief légèrement vallonné et qui a du être marécageux dans le passé. Au loin, derrière un autre relief, un peu de fumée s'élève, indiquant un peu de civilisation.

La jeune aventurière prépare le gibier comme il lui est déjà arrivé de le faire lors de précédentes expéditions.

Après quelques bouchées de viandes et des échanges avec ses compagnons de voyage à propos des cours ou de la durée du voyage, Lystrella interroge ses camarades :

- "Maintenant que nous sommes au sol nous sommes vulnérable. Nous savons que nos adversaires peuvent faire appel à des bêtes capable de pister en ombre. Pour ma part je n'ai aucun problème pour veiller tard ou me lever tôt. Je suppose que notre guide aura besoin du plus grand repos pour pouvoir s'occuper demain d'ouvrir la voie."

- "Qu'en pensez vous mon Oncle ? Nous pourrions couper la nuit en deux ?"

Tristan teste encore quelques atouts. Il essaye de calculer le temps que mettent les cartes de la Vallée de Garnath - qui relie la forêt d'Arden à la mer - et du Port d'Ambre à s'activer, et s'il y a une différence perceptible entre les deux cartes. Bien sûr, il ne quitte pas cette ombre durement atteinte et se contente d'ouvrir un passage, le temps d'un battement de cœur, sans s'y engouffrer. Après avoir pris quelques notes, il rejoint ses compagnons de voyage.

- "Je récupère vite. Mais je ne suis pas contre prendre le dernier tour de garde, s'il faut en passer par là."

Neveux et oncle goûtent un instant de paix autour du feu. Le repas est rustique et contraste avec les mets nombreux et délicats servis la veille à la table d'Ambre. La température reste clémente même si la proximité du feu offre un certain confort.
Bleys sort une pipe de sous son pourpoint. Au moment où il l'allume, le feu accentue la couleur de ses cheveux et de sa barbe, lui donnant un air diabolique.

Se tournant vers Lystrella :
- "Tu ne devrais pas trouver l'ambiance des Cours si différente. Imagine une vaste taverne où se réunissent des marins venant de douze mers et continents. Ajoute des vapeurs de rhum pour la perception. Si quelqu'un te parle mal, éclate de rire puis éclate lui une rotule. Tu peux aussi faire comme Tristan mais cela serait plus correct et ennuyeux". Puis, vers la cible de son sarcasme :
- "Tu peux prendre le dernier tour en effet, je prendrai le premier. Je ne crache pas sur quelques heures de sommeil en plus. Je vous abandonnerai un peu avant notre arrivée aux cours ; j'ai à faire. "

- "Soit mon oncle, de toute façon je peux difficilement faire plus de dégâts qu'en Ambre" Repond la jeune rouquine avec désinvolture mais camouflant mal le malaise qui l'habite depuis le régicide.

- "Je tâcherai quand même d'user de diplomatie. J'ai cru comprendre que les chaosiens étaient friand de duel et je n'aimerai pas passer la majeure partie de mon séjour à enchaîner les combats contres des aristocrates métamorphes !"

Puis sans attendre de réponse, elle se lève et va préparer sa couche. Le tour de garde du milieu lui va à ravir. On a le sommeil léger et on a l'habitude des nuits morcelées quand on est responsable d'un équipage de 50 âmes et qu'on écume les 9 mers. 

Tristan secoue la tête. Suivre le conseil de Bleys permettrait sans doute de survivre à une réception chez les Hendrake. Et à un banquet organisé par sa mère, aussi, Zorah avait un curieux sens de l'humour. Mais briser le genou d'un autre convive lors des agapes rituelles de certaines Maisons plus compassées pouvait causer... Un violent empoisonnement, par exemple. Une fois, le pâtissier d'une Maison voisine s'était soit-disant trompé dans le dosage de la poudre de méduse-minute. Un de ses cousins n'avait pas survécu. Un soulagement pour la plus grande partie de la Maison, certes. Mais Tristan préférait éviter que l'incident ne se reproduise avec un membre de l'autre côté de sa famille. Random n'apprécierait pas.

- "Tout le monde ne dispose pas de la même somme de talents que vous, mon oncle. Les poètes peuvent qualifier l'ennui de mortel, mais j'ai pu vérifier que la colère d'un Souverain Maître d'Hôtel était tout aussi létale. Et beaucoup, beaucoup plus rapide. J'inciterai donc ma cousine à m'imiter, dans un premier temps, au moins auprès des Maisons que j'ai fréquentées."

Un doux sourire sur le visage, Tristan salue son oncle et va lui aussi se coucher. En passant devant Lystrella, il se fait la réflexion qu'un atout de sa cousine pourrait lui être utile. Et il commence à manquer d'atout de lui-même à distribuer. Enfin, s'il manquait de temps, il pourrait recourir à un imagier des Cours. Ou à son cousin Sénestrane.

En s'allongeant, le jeune prince ne s'attend guère à bien dormir. Crapahuter en pleine nature n'a jamais été son loisir favori. Dans sa jeunesse, il en avait cependant retiré une certaine satisfaction, en constatant que les polymorphes s'épuisaient bien avant lui. Il va tout de même essayer de s'accorder quelques heures d'un sommeil léger.